Les enquêtes de L’ICIJ (l'InternationalConsortium of Investigative Journalists)
dont
le Journal « Le Monde » est partenaire, révèlent les scandales liés à
l’évasion et aux fraudes fiscales.
Celle du Luxleaks dévoile que le Luxembourg (1), sous l’autorité de M Juncker, actuel
Président de la Commission européenne, passait des accords fiscaux privilégiés
avec de grandes entreprises internationales, dépouillant ainsi de dizaines de
milliards d’euros les autres états européens.
Celle du Swissleaks divulgue que la deuxième plus grande banque mondiale, la HSBC,
est au cœur d’un des plus grands scandales de fraude fiscale -180 milliards
d’euros sur la période 2006-2007- qui, comme le soulignent les enquêteurs, n'est que la partie immergée...
Les
montants de la fraude fiscale sont maintenant bien connus et sont régulièrement
rappelés par la presse. Pour la France ce sont 60 à 80 milliards d’euros par an
qui sont distraits des caisses de l’Etat et pour l’Europe ce sont plus de 1000
milliards par an (cf
rapport « Lutte contre les paradis fiscaux : si l’on passait des
paroles aux actes » et http://www.senat.fr/notice-rapport/2011/r11-673-1-notice.html).
Depuis
quelques jours, une petite musique se fait entendre : « ça, c’était
avant… » (Michel Sapin le 03/02 sur Canal+), « C’était avant
2008 » (Bernard Guetta le 10/02 sur France Inter). Le refrain est : maintenant
avec l’échange systématique des données bancaires, tout cela c’est du passé.
Certes, des accords ont été conclus ou en
voie d’être obtenus avec ces pays et la commission européenne va faire des
propositions. A ce stade remarquons que l’échange des données bancaires
luxembourgeoises ne s’appliquera officiellement qu’avec les données collectées à compter du 31 décembre 2015 et
pour la Suisse qu’à compter du 1 janvier 2017 … Ce qui donne largement le temps
aux fraudeurs et à leurs mandataires de se « réorganiser ». Quelles
données seront transmises ? Les seuls numéros de comptes et le montant des
intérêts versés ? Quelles informations sur les sociétés écrans et les
produits d’assurances ? Le diable est dans le détail et c’est bien là qu’il
faut aller le chercher. Mais pour le moment il est bien caché dans les paradis fiscaux comme le
souligne l’ancien directeur des enquêtes fiscales dans le journal « Le Monde »
du 11/02/2015 :"Un paradis fiscal est un pays qui pratique le secret de manière efficace et qui ne répond pas aux demandes d'entraide. Selon ce critère, les dix plus dangereux paradis fiscaux sont: l'Etat du Delaware aux Etats-Unis, le Luxembourg, la Suisse, les îles Caïman, le Royaume-Uni (la City of London et ses satellites, comme Jersey, Guernesey, Gibraltar, l'île de Man), l'Irlande, les Bermudes, Singapour, le Liban et Hongkong. Et il est difficile de ne pas remarquer que c'est là, principalement, que nos banques françaises ont établi leurs filiales. Selon une étude publiée en 2014, nos cinq principales banques ont plus de 570 filiales dans les paradis fiscaux." et plus loin il ajoute "le fisc est impuissant. Il ne possède pas les moyens d'intervenir efficacement dans les paradis fiscaux ou même auprès du Royaume-Uni pour avoir des informations sur les trusts."
Quant aux propositions de la commission
européenne, elles tourneraient autour de la publication des accords entre les
états de l’union et les grandes entreprises. Publiés ou non, qu’est-ce que celà change en matière d’évasion fiscale ?
En
définitive, il est probable que « l’après » ressemblera beaucoup à « l’avant »,
il suffira de comparer les sommes recouvrées au titre de la lutte contre la
fraude fiscale et son évaluation (60 à 80 milliards d’euros). La prévision 2015 de rentrée budgétaire sur les avoirs étrangers rapatriés est de 2
milliards … Il y a donc du « boulot » !
(1) Lorsque j'étais en activité (administration fiscale), le Luxembourg était déjà connu depuis des dizaines d'années comme place intermédiaire dans les circuits de fraude à la TVA et les structures opaques !
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