dimanche 16 octobre 2016

PRELEVEMENT A LA SOURCE, "L'EMBROUILLE" ?

QUELQUES CONSIDERATIONS (non exhaustives !) SUR LE PRELEVEMENT A LA SOURCE


 Principe : L’impôt sur le revenu de l’année N est prélevé mensuellement sur les revenus de l’année N  par l’employeur  qui  le verse à l'administration fiscale. La régularisation des paiements  en plus ou en moins se fera  en N+1 après le dépôt d’une déclaration de revenus de l’année N, soit une clôture de l’obligation fiscale  en septembre-octobre N+1.
Tout va bien dans le meilleur des mondes, telle serait la bande annonce à accrocher au site du gouvernement (cliquez ici)  ou encore ici vantant les mérites  du prélèvement à la  source. Pas si simple … Il est important de bien mesurer les conséquences du projet qui va être présenté prochainement au Parlement dans le cadre de la Loi de Finances pour 2017.
Confier le recouvrement de l’impôt sur le revenu à un tiers, l’entreprise, n’est pas anodin. C’est dessaisir et déresponsabiliser une fois de plus  le citoyen  devant  l’impôt. De direct cet impôt sur le revenu devient subrepticement  indirect à la grande joie des théoriciens de  l’impôt dit « indolore ». Ils  ajoutent à la CSG et à la TVA déjà payés par les entreprises pour le compte des contribuables, l’impôt sur le revenu (IR). Ce qui laisse la porte ouverte à toutes les manipulations,   comme par exemple la fusion de la CSG et de l’IR.
Les mesure techniques de confidentialité prévues, n’empêcheront pas l’employeur d’avoir en partie une vue sur la vie privée de ses salariés. En effet le simple fait d’opter pour l’utilisation d’un taux « neutre » d’imposition signalera à l’employeur que le salarié a d’autres revenus, information pouvant alors peser défavorablement sur le salarié lors de la négociation de son salaire.
Que se passera-t-il quand un employeur partira sans laisser  d’adresse ou ne sera plus en mesure de régler les cotisations sociales, la TVA et … l’impôt sur le revenu de ses salariés ? Bon an mal an, 60.000  entreprises sont confrontées à des procédures collectives (plan de sauvegarde, règlement judiciaire et liquidation  judiciaire). Ce sont donc des milliards d’euros qui ne seront pas encaissés et des milliers de salariés qui seront alors dans l’incertitude fiscale.
En cas de changement de situation familiale, de modification des revenus, aux liaisons contribuables/administration fiscale  s’ajoute de fait un intermédiaire : l’entreprise. En cas d’erreur ou de retard dans la mise à jour, le quidam s’entendra dire «  ce n’est pas moi, c’est l’autre le fautif », un classique de la bureaucratie ! Notez par ailleurs, que les réductions et crédits d’impôt  ne seront pris en compte qu’au moment de la liquidation définitive  du dossier, c’est-à-dire en septembre-octobre N+1. Aujourd’hui, dans ce cas de figure, vous pouvez moduler vos prélèvement dès janvier N+1. Nombreuses seront les situations où le contribuable fera de l’avance de trésorerie à l’Etat.
Dans tous les cas et il faut le répéter, il y aura une déclaration de revenus à établir en N+1 qui entrainera une régularisation. Si cette dernière dégage un supplément d’impôt il faudra le régler directement à la Direction des Finances Publiques. A l’inverse, s’il s’agit d’un trop perçu, le contribuable le recevra  sur son compte bancaire.Quant au taux de prélèvement de l'année N il sera calculé en fait avec les revenus et le barème de l'année N-2 !
Le taux de recouvrement de l’IR est actuellement proche de 99% et il est un des meilleurs taux européens. En consultant minutieusement les 32 pages du  projet de loi (cliquez ici) et les 413 pages du rapport présenté au Parlement (cliquez ici) on constate que le risque « d’usine à gaz » est grand. Projection redoutée aussi par les professionnels de la fiscalité : pas moins d’un millier d’agents des impôts ont posté des questions techniques,  sur le forum de leur administration  dédié au prélèvement à la source.

Tout en conservant le système actuel (déclaration en N+1 et acomptes versés en N+1 au titre de l’IR de N), ce taux de recouvrement pourrait être amélioré en rendant obligatoire la mensualisation et les paiements par prélèvements sur les comptes bancaires (actuellement les contribuables ne sont que 70% à utiliser ce mode de paiement). C’est simple, mais pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué !  Le prélèvement à la source ne serait-il pas une « embrouille »  de plus ?

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