mardi 20 décembre 2016

TENIR BON

Dans les livres comme dans la réalité, la vie est âpre, le monde va mal. Dans les livres comme dans la réalité, de belles personnes résistent, font face, tiennent bon. Dans la réalité, nous en connaissons, elles forcent notre admiration. Dans les livres, elles deviennent des personnages inoubliables.

Man Ninotte était la mère de Patrick Chamoiseau. Cinq enfants, une vie matérielle éprouvante, une volonté tenace de résister face à toutes les difficultés.
Dans La matière de l’absence (Editions du Seuil 2016), Patrick Chamoiseau évoque avec tendresse et humour cette femme qui a traversé tant de périls. Mais il n’en reste pas à la chronique familiale et ce n’est pas seulement de la vie puis de l’absence de cet être bien-aimé dont il parle. C’est toute l’histoire des Antilles qu’il retrace, celle des peuples, esclaves et colonisés, qui ont tenu bon à travers les âges pour mener une vie digne et libre.
A partir du sentiment intime de l’absence de sa mère, Patrick Chamoiseau ouvre au monde, à l’universel et dévoile une pensée puissante et riche dont la lecture est particulièrement  bienfaisante.
Dans L'Heure bleue, Laure Adler reçoit Patrick Chamoiseau et une critique du roman est publiée ici.

 Une autre mère, celle-ci en grand désarroi. Une vie sans cesse chahutée dès l’enfance, une famille éclatée sous les coups d’un homme qu’elle quitte en emmenant leurs deux fils. Ceux-ci,  devenus délinquants, trafiquants, sont emprisonnés. La voici seule, dans un appartement dévasté par une perquisition, en attente d’être expulsée. Non seulement elle n’a plus rien, mais elle est surtout indésirable pour ses voisins qui ont signé une pétition exigeant son départ.
Tenir bon, pour elle, c’est attendre une huissière hautaine dans un appartement presque vide, c’est se remémorer des années de galère, d’humiliation, de violence, c’est se demander ce qu’il aurait fallu faire pour éviter ce désastre, c’est fuir devant le mépris et se dresser avec rage dans la ville.
Pour écrire Par la ville, hostile (Mercure de France 2016), Bertrand Leclair s’est inspiré d’un fait divers, l’expulsion d’une famille pour cause de trouble à l’ordre public. Dans un long entretien, il décrit sa stupeur devant l’absence d’humanité de l’institution et de la société. Il explique comment il a cherché à se représenter à lui-même ce qui est fait à l’humain. Ce roman qui donne du corps et de la chair au malheur est un élan de colère contre l’indifférence.

 Parmi tous les personnages qui évoluent dans Continuer, le roman de Laurent Mauvignier (Editions de Minuit 2016), voici encore une mère qui résiste pour empêcher que son fils, grand adolescent, sombre dans la délinquance. Face à un père lointain et niant le mal-être du jeune homme, elle prend des décisions énergiques qui l’engagent : elle se met en congé de son poste de médecin à l’hôpital, elle vend la maison de ses parents, sous-loue son appartement et emmène son fils parcourir à cheval les montagnes du Kirghizistan.
Dans ce périple, au milieu de paysages grandioses, face à des rencontres pleines d’humanité ou imprégnées de violence, courant autant de dangers que de bonheurs, elle tient bon pour soutenir son fils et ose regarder le cours de sa propre vie.
Pour faire connaissance avec Laurent Mauvignier, il y a son site et pour découvrir son roman, il y a une critique.
  

En 2017, tenir bon et… lire encore !

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