TOUT EN MUSIQUE
Quand musique
et littérature s’allient, cela crée des accords harmonieux. Mots et notes
résonnent en romans originaux, sensibles, au souffle puissant. Suggestions
parmi les titres récemment parus.
La musique pour
survivre : ce pourrait être le motif du roman d’Akira Mizubayashi,
Âme brisée (Gallimard 2019). L’âme est celle du violon, pièce sensible
et indispensable qui développe les vibrations et donne son ampleur à
l’instrument.
A Tokyo en 1938, un
quatuor d’amateurs se réunit régulièrement pour interpréter Schubert.
Soupçonnés de complot, les membres de la formation sont arrêtés lors d’une
répétition.
Rei, onze ans, fils
du violoniste, assiste à l’arrestation de son père et au massacre de son
violon. Il échappe à la violence grâce à l’un des militaires qui lui remet
discrètement l’instrument brisé. Le garçon ne reverra jamais son père. Il
deviendra luthier et sa vie durant, il travaillera à réparer le violon,
cherchera à lui rendre son âme. Grâce à la complicité de son épouse archetière,
des questions trouveront réponses, les événements du passé seront expliqués et
le violon reprendra vie.
C’est un roman
particulièrement sensible et émouvant de l’auteur japonais. Il en parle ici et là
se trouvent les premiers chapitres du livre.
Anna Enquist connaît
la musique : elle est pianiste concertiste. Elle connaît également les
tréfonds de l’âme humaine car elle est psychothérapeute. Son récent roman,
Car la nuit s’approche (traduit du néerlandais par Emmanuelle Tardif,
Actes Sud 2019) mêle les compétences de son auteure.
A la suite d’un
attentat – évoqué dans Quatuor (Actes Sud 2016) – les membres de
la formation se sont dispersés. Caroline la violoncelliste, amputée d’un doigt,
tombe dans une dépression. Son mari Jochem poursuit ses activités de luthier
tout en sombrant dans une paranoïa sécuritaire. Elle s’envole vers la Chine où
elle rejoint Hugo devenu organisateur de festivals artistiques. Quant à Heleen,
elle a totalement changé de vie. Les quatre amis ne se retrouveront qu’à
l’occasion du procès de l’auteur de l’attentat.
Le fil du roman est
tenu par Caroline, sa révolte, ses angoisses, son rejet de l’obsession
sécuritaire de Jochem, ses questionnements, ses aventures. Mais Anna Enquist
montre pour chaque protagoniste les étapes plus ou moins vives de la
reconstruction de leur personnalité blessée. Alors que dans Quatuor, le
groupe se constituait autour de la musique, ici c’est la part de l’humain qui
est primordiale. Les premières pages de ce beau roman de la musique empêchée
sont ici.
Voilà une musique bien mystérieuse ! A
Prague, une cantinière retraitée dit recevoir de l’au-delà des partitions
qu’elle retranscrit fidèlement. Le compositeur qui lui rend visite et lui dicte
les notes une à une n’est autre que Frédéric Chopin, mort en France un siècle
et demi auparavant. Une maison de disques veut enregistrer et diffuser ces
œuvres posthumes. Un journaliste de la télévision est chargé d’enquêter afin de
réaliser un documentaire.
Avec La télégraphiste de Chopin (Seuil
2019), Éric Faye s’attaque au surnaturel. S’inspirant de la vie de Rosemary
Brown, medium anglais, il décrit habilement le travail de l’enquêteur qui tente
de déjouer une supercherie géniale. Sont utilisées les techniques classiques de
l’espionnage : écoutes, filatures, surveillance. Mais si mystification il
y a, elle est aussi difficile à déceler que l’effluve discret du parfum qui
l’entoure.
On peut écouter longuement ici
l’auteur de ce roman passionnant.
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